Contradictions et normes sociales : sommes-nous vraiment libres de nos choix ?
En séance, les gens parlent souvent de petites anecdotes du quotidien.
Mais derrière ces détails en apparence banals, se cachent parfois des contradictions plus profondes.
Prenez Alexandra.
Elle raconte, avec une pointe d’agacement, qu’elle doit aller chez le kiné.
Le rendez-vous en lui-même n’est pas le problème.
Ce qui la dérange vraiment c’est qu’elle doit aller chez l’esthéticienne pour s’épiler les jambes avant d’y aller, parce que, dit-elle » ça ne se fait pas ! « .
Pourtant, Alexandra est féministe.
Deux idées s’opposent en elle :
se conformer aux attentes sociales en s’épilant
rester fidèle à ses convictions et assumer pleinement son choix.
Peut-être qu’Alexandra à simplement envie de plaire et c’est ok aussi.
Pourquoi on se sent tous coincés parfois ?
Face à son dilemme, on pourrait :
soit critiquer l’apparente contradiction entre ses convictions féministes et ses actes,
soit éprouver de l’empathie pour Alexandra, prise au piège des normes imposées par la société.
Mais si on y met de la nuance, on voit autre chose : Le Biais de Conformité.
Sous l’effet du biais de conformité, nous avons tendance à imiter les comportements du groupe pour éviter le rejet, parfois au prix de nos propres valeurs ou désirs.
Dans un besoin d’appartenance, le biais de conformité agit comme une réponse naturelle à notre peur d’être exclu, mais il peut aussi devenir un obstacle dans notre désir d’être nous-même.
Et ce, malgré l’évidence.
Cette pression sociale a été mise en évidence par une expérience célèbre : celle de Solomon Asch.
Dans cette expérience, un groupe de personnes était composé de volontaires et de complices.
On demande à l’ensemble des participants de désigner la ligne parmi les 3 proposées qui correspond selon eux à une ligne de référence ce à quoi les complices désignaient volontairement une ligne de longueur différente.
Deux cartes mises à disposition des cobayes : sur celle de gauche, la ligne est la ligne de référence ; sur celle de droite, les trois lignes sont les lignes de comparaison.
75 % des volontaires, qui n’ont pas connaissance de la supercherie, ont, au moins une fois, donné la même réponse incorrecte que le groupe, malgré l’évidence.
Ce type de conformisme montre à quel point il peut être difficile de rester fidèle à soi-même face à la pression d’un groupe.
Comment assumer ses convictions dans ces conditions ?
C’est ce qui arrive à Alexandra.
Elle fait le choix qui lui parait le moins douloureux : suivre la norme sociale pour éviter critiques et jugements au détriment de ce qui lui parait juste.
Alexandra est piégée par un mécanisme qu’elle ne contrôle pas totalement, parce qu’il agit à un niveau inconscient.
Ce biais de conformité, bien qu’invisible, exerce une influence puissante sur ses décisions.
Elle ne ‘choisit’ pas vraiment de s’épiler : ce sont des normes intégrées depuis longtemps qui la poussent à prendre cette décision.
Il est facile d’avoir un avis sur Alexandra mais ces contradictions ne sont pas propres à elle.
Elles nous concernent tous.
Posez-vous la question : dans votre vie, a quel moment vous avez fait quelque chose qui vous a fait grincer des dents ?
tous les jours au travail en n’osant pas dire non ?
dans la relation avec votre conjoint en laissant passer une remarque blessante pour ne pas créer de conflit ?
en allant voir des amis alors que vous rêvez juste de rester chez vous, tranquille ?
Ce sentiment, on peut s’en libérer.
Cela demande du temps, du travail sur soi, aller chercher à l’intérieur de soi ce qui nous pousse à nous conformer au groupe.
Être attentif à ces moments où l’on se sent tiraillé est une première étape.
La suivante pourrait être de se demander :
Est-ce vraiment ce que je veux ?
Ou est-ce une attente extérieure à laquelle je me conforme ?
Cette prise de conscience est une étape essentielle pour commencer à reprendre le contrôle sur nos choix et avancer vers un épanouissement authentique.
Et comme le dit Ralph Waldo Emerson :
« Être soi-même dans un monde qui tente constamment de faire de vous quelqu’un d’autre est le plus grand des accomplissements. »