L'inaction : un retour à soi dans un monde toujours plus impatient
Lors d’une formation, une phrase a profondément changé ma façon de voir ces moments où je ne fais rien — ces instants de pause que l’on associe souvent à de la procrastination.
La discussion portait sur la difficulté qu’éprouvent certaines personnes à décrocher, à s’arrêter, à simplement ne rien faire, jusqu’à ce que l’épuisement s’installe, et que l’inaction devienne source de malaise.
Alors que le groupe opposait action et inaction, Otman a proposé un autre regard :
Et si l’inaction était, en réalité, une forme d’action ?
« Étymologiquement, le préfixe in- peut désigner :
une absence, comme dans inconfort, instabilité, injustifiable ;
mais aussi un mouvement vers l’intérieur, comme dans inoculer, introspection, incarner.
Dans le langage courant, l’inaction est associée à une absence d’énergie, à un manque, quelque chose de négatif.
Et si, au contraire, elle était simplement une action, non plus tournée vers l’extérieur, mais vers l’intérieur ?
L’inaction ne serait alors plus un vide ou un problème, mais un espace d’écoute, un geste envers soi-même — un moment où l’énergie cesse de se disperser à l’extérieur pour revenir à l’intérieur. »
Ce changement de perspective m’a intrigué.
Et au fond, peu importe le sens étymologique d’origine.
Ce qui compte, c’est le sens que je choisis de donner à ces instants.
Dans un monde qui valorise sans cesse les réalisations, la performance, la productivité, croire que l’inaction est un défaut ou une absence d’élan, c’est souvent reproduire des schémas hérités — éducatifs, sociaux, culturels — qui freinent notre recherche d’équilibre, d’épanouissement et de sérénité.
Repenser l’inaction comme une démarche intérieure, comme une action tournée vers soi, c’est lui redonner toute sa légitimité : celle d’un espace nécessaire, pas d’un moment à fuir.
L’idée n’est pas de se perdre dans des oppositions philosophiques entre action et inaction.
C’est de ne plus réagir mécaniquement quand on ne fait rien, en se jugeant ou en culpabilisant.
Au lieu de se dire “je procrastine, je ne suis pas productif·ve, je devrais faire quelque chose”, on peut simplement se demander si cette inaction a un intérêt.
Se poser cette question permet de distinguer deux réalités très différentes :
est-ce que je fuis une action importante ?
ou est-ce que je suis simplement en train de répondre à un impératif automatique de productivité ?
Il est facile de tomber dans le « il faut », le « je dois » et nul doute que vous trouverez toujours quelque chose à faire.
Prendre ce temps de réflexion, c’est se donner l’opportunité de redevenir notre priorité plutôt que de rester dans la réactivité d’impératif issu de vieux automatismes.
C’est ça qui permet de remettre en question certains de nos comportements..
Se foutre la paix – s’accorder ce droit sans culpabiliser – permet à l’action extérieure d’être plus juste, plus alignée, plus efficace.
Ces instants, loin d’être vides ou porteurs de culpabilité, deviennent alors des lieux précieux de retour à soi.
Comme pour beaucoup de choses, c’est l’équilibre qui ouvre la voie à un véritable alignement.